L’Alliance pour la République (Apr) vient de bénir la naissance de la Task force républicaine (Tfr) qui a quasiment les mêmes missions et objectifs que la Convergence des cadres républicains (Ccr). Deux structures qui vont désormais se marcher sur les pieds, avec tous les risques de conflit interne que cela peut induire. Pour ne rien arranger, une contestation des dernières décisions de Macky Sall a donné naissance au Collectif des authentiques militants (Cam). Et la tension est déjà perceptible à travers les réseaux sociaux, où la Task force républicaine (Tfr) est particulièrement prise à partie.
A défaut d’une structuration formelle, à l’instar de tous les partis politiques, l’Apr vole de structure en structure, pour assurer sa vie et son rayonnement. D’où la naissance de la Task force républicaine, regroupant de hauts cadres du parti (ministres, députés, directeurs généraux). «Prenant conscience de leur responsabilité historique face aux immenses défis auxquels le Sénégal est confronté, des responsables de l’Alliance pour la République (Apr), engagés pour le triomphe de l’idéal républicain, ont décidé, sur instruction de la direction du parti, de mettre en place un cadre de réflexion, d’échange, d’animation politique et de formulation de propositions sur la conduite des affaires publiques et la vie du parti», ont fait savoir les membres de la nouvelle structure. Qui auront aussi pour mission la «défense du Sénégal, du parti et du président de la République». Cela, en portant la réplique aux forces politiques et sociales qu’ils qualifient d’anarchistes et populistes, qui tendent à «imposer les termes d’un débat public qui vise à annihiler les efforts et la bonne trajectoire du Sénégal».
Chevauchement en vue entre la Ccr et la Tfr qui se fait déjà tirer dessus
Mais cette nouvelle trouvaille vient se superposer à une structure déjà existante, avec les mêmes missions : la Convergence des cadres républicains (Ccr) dirigée par le ministre de la Santé Abdoulaye Diouf Sarr. Il y aura sans doute chevauchement et doublon. Surtout que les membres de la Tfr appartiennent de facto à la Ccr. L’équipe de Diouf Sarr et celle de Biram Faye (coordonnateur de la Tfr) vont se marcher dessus. A moins que la dernière initiative n’achève la première, peu audible et très souvent critiquée pour sa passivité. Mais la Ccr acceptera-t-elle que cette nouvelle trouvaille lui fasse de l’ombre et ses responsables et animateurs avec ?
Que vont faire ou devenir Diouf Sarr et Cie face à la montée de la Tfr, qui visiblement à la bénédiction du patron de l’Apr ?
En tout cas, sur les réseaux sociaux, la «guerre» des structures est déjà lancée. Et les détracteurs du groupe des 30 ne se gênent pas. «La Ccr n’a-t-elle plus de cadres, au point que d’autres veuillent réfléchir à leur place ?», interroge Thaye Diaby, un des détracteurs de la nouvelle structure. Un autre jeune de la Cojer, Khady Béloya Ndiaye, elle, lance les hostilités. «Bientôt va sortir la liste des diambars. A côté de chaque guerrier, il y a un diambar qui est meilleur que lui. Vive le match Diambar-guerrier», cogne-t-elle. Irritée par la mise en place de la Tfr, elle assène : «comme il y a une Task force qu’ils ont eu le toupet d’annoncer publiquement, que chacun prenne ses responsabilités. Que le parti éclate et qu’on leur laisse tout gérer. L’engagement politique rime avec considération. Et cela est un manque de considération (pour les structures qui existent déjà)».
La Cam refuse que les militants «authentiques» soient sacrifiés à l’autel des nouvelles alliances
En plus de la rivalité entre Tfr et Ccr, une 3ème structure va venir corser la donne. Il s’agit du Collectif des authentiques militants (Cam), monté par de jeunes cadres apéristes, frustrés par les dernières décisions du chef de l’Etat qui, à leur yeux, a préféré ses anciens adversaires à ses compagnons de toujours. «Le Cam est pour l’instauration de la dignité des militants authentiques. Nous sommes des militants de l’Apr et non des esclaves doublés de larbins dans l’Apr. Il faut finir avec la dictature dans l’Apr ou mourir de regrets», clame un des animateurs, Thiaye Diaby. Qui poursuit : «dans l’opposition, on demeure convaincu que l’engagement politique peut bien s’accommoder de l’éthique, de la morale et de la loyauté. Au pouvoir, on nous impose d’être loyal en s’accommodant d’un engagement politique sans éthique ni morale». Pour lui, «l’Apr est un clavier qui a perdu tous ses boutons, sauf deux : se battre ou bouder». Son compagnon de lutte à la Cam, René Pierre Yéhoune d’ajouter : «nous sentinelles de la démocratie, membres authentiques de l’Apr originel, voulons accompagner le frère Président pour que cette recomposition du camp libéral ne soit pas ou n’ait pas pour corollaire une décomposition de notre parti ! Voilà le cri de notre guerre. Unis nous vaincrons».
Pour montrer qu’ils sont déterminés à aller au bout de leur combat, ils sont en train de tisser leur toile et de recruter. Il y a une dizaine de jours, ils étaient en conclave à Somone et samedi dernier, ils ont effectué un déplacement à Touba. C’est dire que le parti présidentiel n’est pas loin de muer en armée mexicaine. A moins qu’entre-temps, Macky Sall ne siffle la fin de la récréation. Lui qui a commencé à reprendre langue avec les grands frustrés comme Cissé Lô.
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