Ferdinand Coly : «Éviter le syndrome Amara Traoré en 2012»

Samedi 25 Septembre 2021

Le jeu des Lions a eu une nette évolution ces derniers temps. C’est l’avis de l’ancien défenseur des Lions. Ferdinand Coly a également évoqué, dans cet entretien avec le quotidien sportif RECORD, le contrat d’Aliou Cissé qu’il qualifie de sensible. Eut égard à un épisode récent de la vie de la sélection.

Ferdi, deux victoires en deux sorties dans les éliminatoires du Mondial Qatar-2022, de bon augure pour l’équipe du Sénégal ? 


 
Oui, c’est clair que sur le plan comptable, on a fait ce qu’il fallait. Car il fallait, surtout, bien démarrer ces opérations de qualification. Ça a été bien fait. On a vu aussi que l’équipe est en train de monter en puissance, même si tout n’est pas parfait, notamment sur le plan du jeu. On doit donc les féliciter, tout en exigeant plus de l’équipe parce qu’on sait de quoi elle est capable. Mais force est de reconnaître qu’il y a une nette amélioration. L’appétit vient en mangeant, à force de gagner, je pense que l’équipe s’habitue à la gagne.


 
D’aucuns estiment que le jeu des Lions n’est toujours pas huilé. L’entraîneur Aliou Cissé a-t-il atteint ses limites ?


Non, je pense qu’on ne devrait pas voir les choses ainsi. Parlons plutôt de l’évolution de l’équipe. J’espère ne pas me tromper, mais je pense qu’on a atteint notre apogée avec cette finale perdue contre l’Algérie en 2019. C’est sûr que ça laisse des traces, l’équipe en a souffert un peu. Mais ils ont repris la marche et aujourd’hui avec ce sang neuf qu’il est en train d’injecter à l’équipe, on espère que ça va évoluer. Parce que l’équipe a un énorme potentiel, tout le monde est d’accord là-dessus. Mais des grands joueurs ne font pas forcément une grande équipe. Parce qu’une équipe c’est des automatismes, des affinités qui doivent être travaillées par le coach. Mais je pense qu’on a eu ces matches qui nous ont permis de garder espoir. On a vu un sursaut d’orgueil des joueurs et je pense qu’il y a eu un discours en interne. J’ai vu quand même un changement d’attitude, avec beaucoup plus d’agressivité. Et les joueurs, aussi, ont été piqués dans leur orgueil, parce qu’ils sont souvent critiqués. Ils ont donc voulu montrer leur caractère. Et je pense que leurs dernières sorties montrent qu’il y a une évolution par rapport au mois de juin quand il y a eu ce petit déclic sur les deux matches qu’on avait disputés. Après le 3-5-2, Aliou est revenu à 4 derrière. Mais je pense qu’il y a eu une discussion en interne. Les joueurs en concertation avec leur coach, ont décidé ensemble de revenir avec quatre défenseurs derrière. 


Pouvons-nous juger l’équipe du Sénégal avec des adversaires modestes comme le Togo, le Congo et la Namibie ?


Effectivement, ces adversaires ne sont pas des foudres de guerre. C’est pourquoi, il faut faire le carton plein. Maintenant, c’est sûr qu’au deuxième tour, ce sera autre chose. Ce sera un adversaire beaucoup plus redoutable, qui pourra nous mettre en danger à n’importe quel moment. Jusqu’à maintenant, on peut dire qu’on gère, même s’il faut faire le travail face à des adversaires de notre standing comme la Côte d’Ivoire, l’Algérie ou le Maroc. 


Son contrat est arrivé à terme le 31 août dernier. Cissé ne doit-il pas être reconduit pour avoir atteint tous les objectifs ?


Oui, bien sûr, c’est une épine, pas dans le pied d’Aliou Cissé, mais les pieds des fédéraux. Parce que cette situation est inconfortable, cette situation n’est pas gage de stabilité. Donc quand on arrive à quelques mois de la CAN, il faut statuer assez vite et trouver une solution sur ce contrat. Un avenant peut-être, je ne sais pas. Mais il faut que l’équipe parte à cette CAN la tête tranquille. Après, qu’on puisse tirer le bilan de la compétition. Je me rappelle en 2012 quand on avait connu pareille situation, avant de partir à la CAN avec Amara Traoré, le staff était parti sans contrat. Et on ne souhaite pas que ça se reproduise. Pour moi, c’est un manque de confiance, donc il faut rapidement trouver une solution. C’est une situation gênante. J’appelle les fédéraux à se pencher sur ce cas, faire tout ce qu’il faut pour que l’équipe parte l’esprit libéré. Après, les résultats suivront, espérant qu’on gagne cette coupe. Cela passe d’abord par mettre tous les atouts de notre côté.


Aliou Cissé demande 2 ans de contrat. N’est-ce pas exagéré ?


On peut donner 4 ans même s’il faut. Je pense qu’à quelques mois de la Can, ce serait précipité de rentrer dans ces prolongations. Il faut trouver une solution, je ne sais pas laquelle. Mais il le faut avant la Can pour qu’après, on puisse évaluer. Si on gagne la CAN, on peut donner 10 ans même. S’il ne gagne pas, lui-même il sait. Ce n’est même pas la peine de lui faire un dessin, il a perdu des Can en 2017 et en 2019. Aujourd’hui, tout le monde l’attend pour qu’il ramène la Coupe. C’est l’objectif qu’on lui a fixé.


Partagez-vous le même avis qu’el Hadji Diouf qui dit que Cissé ne doit pas attendre d’être viré s’il ne gagne pas la prochaine CAN ?


Il y a des contrats qui ont été signés. Tout dépendra de ces contrats. C’est une discussion que va avoir Aliou Cissé et les fédéraux pour voir quel compromis trouver. Mais signer 2 ans avant la CAN... je pense qu’ils attendent la CAN, tout en laissant Aliou Cissé dans une certaine stabilité pour trouver une solution assez vite. 


Le déplacement à Johannesburg contre la Namibie risque d’être difficile avec la perspective d’y aller sans plusieurs joueurs ?


Oui, effectivement que c’est un handicap. Mais tout ça vient s’ajouter aux problèmes d’Aliou Cissé et du Sénégal. Parce qu’on a quand même un contingent assez important en Angleterre et surtout notre joueur majeur Sadio Mané. C’est l’occasion aussi pour certains de sortir de l’ombre et de marquer des points. Parce que Sadio peut être blessé, on ne le lui souhaite pas, et il faudra aussi que d’autres s’expriment. Sadio c’est notre meilleur joueur, mais il faut que d’autres puissent tirer leur épingle du jeu. Ce sera l’occasion de donner la chance à d’autres. Il faut vraiment qu’on arrive à gérer ce problème. Qu’on se qualifie et qu’on puisse préparer ce deuxième round qui sera terrible.


N’est-ce pas un échec si le Sénégal ne gagne pas la prochaine CAN ?


Vu l’effectif, la qualité des joueurs, ou même l’évolution positive qu’a l’équipe après cette finale perdue, on n’attend pas moins du Sénégal qu’il ramène la coupe. Après, on connait les aléas du football, la meilleure équipe n’est pas forcément celle qui va gagner la CAN. Avec ces incertitudes et notre adversaire légendaire qu’est le Cameroun, il est clair que ce ne sera pas facile. Il y a aussi les autres ténors du football africain qui vont se manifester. Donc, c’est énormément de pression, et ils sont conscients des attentes que le peuple sénégalais place en eux. Et franchement, je leur souhaite de décrocher le titre continental et de nous faire rêver.


Par Bacary CISSÉ


 
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