Médina Gounass : Chronique d'une rivalité Sanglante entre "Foutankés et Fouladunkas"

Mercredi 19 Juin 2024

Médina Gounass n’était pas à la fête le jour de la Tabaski. Des affrontements entre les disciples de Thierno Amadou Tidiane Bâ (Foutanké) et ceux de Thierno Mounirou Baldé (Fouladunkas), deux marabouts rivaux, ont fait un mort et plus de trente blessés dans cette commune du département de Vélingara, lundi 17 juin. Les échauffourées ont également causé d’importants dégâts matériels.

Le ministre de l’Intérieur, Jean-Baptiste Tine, s’est rendu dans la cité religieuse ce mardi et a appelé au calme. Pendant ce temps, selon L’Observateur, la gendarmerie, chargée de l’enquête, a procédé à une trentaine d’arrestations.

Les affrontements entre disciples rivaux à Médina Gounass sont fréquents et remontent à loin. L’Observateur explique que ces tensions ont débuté en 1978, lorsque la politique a fait son entrée dans la cité avec l’érection de la localité en chef-lieu de communauté rurale. Seydou Bâ, ancien maire de la localité, se souvient des heurts survenus en 1995. « Des maisons ont été gelées suite à ces affrontements », souligne-t-il. Un arrêté préfectoral avait été pris par Alioune Badara Mbengue pour restituer les terres, mais sans succès. Ces terres sont depuis devenues des dépotoirs.

Seydou Bâ rappelle également avoir été victime des rivalités entre les pro-Thierno Amadou Tidiane Bâ et les pro-Thierno Mounirou Baldé : « Ma voiture avait été incendiée et mon domicile attaqué en 2019. Les auteurs ont été identifiés, mais sans suite. »

Médina Gounass a été fondée en 1935 par El Hadji Mamadou Seydou Bâ. À l’époque, les « Foutankés » et les « Fouladunkas », aujourd’hui rivaux, vivaient en harmonie. Cependant, leurs relations se sont détériorées au fil du temps, aboutissant à des affrontements fréquents et sanglants.

Douze ans après les événements de 1995, un autre épisode violent a marqué les esprits. « Le 2 janvier 2007, un article de Wal fadjri signé Cheikh Dieng écrivait que ‘le feu couve à Médina Gounass depuis fort longtemps avec deux communautés religieuses qui se regardent en chiens de faïence’ », rappelle Bés Bi. Le quotidien ajoute que, selon Saliou Fatma Lô du journal Le Soleil, les affrontements avaient causé plusieurs blessés, dont un par balle, un autre par arme blanche et un troisième présentant des hématomes à la tête. Sur le plan matériel, la voiture du khalife des « Toucouleurs » avait été vandalisée et trois cases brûlées. Ces événements s’étaient également déroulés le jour de la Tabaski.

L’Observateur détaille : « Après avoir terminé les deux rakas de la prière, les fidèles, pour se rendre au domicile de leur khalife Thierno Amadou Tidiane Bâ, sont passés par la voie occupée par l’autre camp, qui écoutait le sermon de leur guide, l’imam et khalife Thierno Amadou Baldé. La mosquée de ce dernier se situe à 200 mètres du domicile et de la mosquée de Thierno Amadou Tidiane Bâ. Les klaxons et vrombissements des moteurs des autos et motos ont révolté les disciples de Thierno Amadou Baldé, qui ont interrompu l’office pour laver cet affront. Il y a eu plusieurs blessés graves et des règlements de comptes qui se sont étendus aux villages satellites, avec des cases brûlées et du bétail agressé au coupe-coupe. »

Le journal du GFM informe que le calme n’est revenu qu’après les décès, en l’espace de 24 heures, des deux épouses nonagénaires du fondateur de Médina Gounass. « Ces deux dames ont couvé et bercé la plupart des dignitaires actuels des deux communautés, à une époque où la cohésion était de rigueur et où tous étaient disciples de leurs époux khalifes. Une cohésion qui a volé en éclats. »
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