C’est la douche froide. Après avoir été au deuxième tour des élections présidentielles il y a à peine un mois, le Front national et Marine Le Pen ont subi dimanche un important revers aux législatives. Florian Philippot, vice-président du parti, a reconnu une déception, Nicolas Bay un « tassement plus important » que prévu. « Les électeurs du Front ne sont pas allés voter », a tranché l’eurodéputée philippotiste Sophie Montel. « Y’en a qui sont en marche, nous on s’est mis en pause » a balancé, dépité, Jean-Lin Lacapelle.
>> A lire aussi : VIDEO. Législatives : La claque pour les partis traditionnels
Si le parti d’extrême droite recule traditionnellement entre le premier tour de l’élection présidentielle et celui des législatives, cette année, ce recul est plus important que jamais : le FN passe de 21,3 % à environ 13,3 %, selon la totalisation nationale sur 97 % des inscrits reçus à 00h30. Cela donne plus de quatre millions de voix évaporées, le FN passant de 7,7 à environ 3 millions.
Pendant cette courte campagne, le FN voulait capitaliser sur les 10,64 millions d’électeurs qui s’étaient portés sur Marine Le Pen au second tour. Obtenir un groupe parlementaire, longtemps objectif minimum pour les frontistes, paraît désormais hors de portée, d’autant que la forte abstention réduit à quasi-néant les triangulaires, qui avaient permis au FN de remporter ses deux circonscriptions en 2012 avec Marion Maréchal-Le Pen dans le Vaucluse et Gilbert Collard dans le Gard.
Plusieurs figures frontistes ont été balayées dès le premier tour, tel Nicolas Bay (Seine-Maritime), patron de la campagne FN pour les législatives ; Jean-Lin Lacapelle (Bouches-du-Rhône), secrétaire général adjoint du parti, ou encore le comédien Franck De Lapersonne (Somme). D’autres sont dans une situation compliquée pour le deuxième tour. C’est le cas de Gilbert Collard dans le Gard, de Louis Aliot dans les Pyrénées-Orientales, de Florian Philippot en Moselle ou bien encore de Stéphane Ravier dans les Bouches-du-Rhône.
Marine Le Pen en tête dans le Pas-de-Calais
Rare éclaircie pour le parti, Marine Le Pen, à nouveau candidate dans la 11e circonscription du Pas-de-Calais, où se trouve la mairie FN d’Hénin-Beaumont, est en position très favorable, avec 46 % des voix au premier tour.
Mais alors que les frontistes avaient surligné 45 circonscriptions « gagnables », où Marine Le Pen a dépassé 50 % au second tour de la présidentielle, quelques rares circonscriptions seulement semblent encore jouables pour le FN : Bruno Bilde et José Evrard dans le Pas-de-Calais, Sébastien Chenu dans le Nord et Emmanuelle Ménard dans l’Hérault.
Pour se rassurer, les membres du parti frontiste jouent sur les chiffres. « 110 candidats FN sont qualifiés au second tour contre 61 en 2012 : une indéniable progression ! », s’est félicité Nicolas Bay.
Mais cette supposée « progression » ne peut cacher que le résultat de 2012 était supérieur en voix comme en pourcentage, alors que jusqu’ici Marine Le Pen avait toujours progressé d’un même scrutin à l’autre. Depuis son QG de campagne d’Hénin-Beaumont, celle qui avait proclamé le FN « première force d’opposition » le soir du premier tour de la présidentielle amis en cause « l’abstention catastrophique » qui « pénalise » son parti et le scrutin majoritaire à deux tours, le FN réclamant l’instauration de la proportionnelle qui lui avait permis de faire élire 35 députés en 1986.
Marine Le Pen se veut tout de même optimiste. Elle a appelé ses partisans à la mobilisation, tablant sur des « réserves de voix considérables » pour l’emporter dans « plusieurs circonscriptions ». « Les gens aujourd’hui ont voté plages, barbecues et soleil. Il ne faudra pas se plaindre dans 6 mois ! » a quant à lui ragé sur Twitter le sénateur FN Stéphane Ravier, espérant, sans doute, culpabiliser les électeurs.
Vers une refondation du FN ?
Cette déconvenue va provoquer une baisse de la subvention publique annuelle du FN par rapport à 2012, largement basée sur le nombre de suffrages obtenus lors du premier tour de ce scrutin, et ce alors que le parti dit manquer d’argent.
Surtout, ce score devrait raidir encore le débat interne sur la « refondation » du FN, déjà alimenté par le retrait temporaire de Marion Maréchal-Le Pen de la politique, l’échec de l’alliance avec Nicolas Dupont-Aignan et les menaces de Florian Philippot de quitter le parti si celui-ci renonçait à la sortie de l’euro. « Il y aura du sang sur les murs au congrès », prévu pour fin 2017 début 2018, pronostique un conseiller régional FN interrogé par l’AFP. « On a payé surtout sur le terrain l’euro et le débat présidentiel » de Marine Le Pen face à Emmanuel Macron, « raté » du propre aveu de la présidente du FN, avance un responsable départemental.