Des ambitions présidentielles sont prêtées à Karim Wade et même le PDS, sur instruction d’Abdoulaye Wade, son père en a fait son candidat. Mais le fils de son père disposant, dit-on, d’une nationalité française, et ayant passé l’intégralité de sa jeunesse en France, Karim Wade traine un grand handicap. C’est l’usage du Wolof, langue véhiculaire et vernaculaire au Sénégal.
Pays conservateur et ayant un attachement atavique avec l’oralité, le Sénégal tient à celui qui intègre en lui et en toute sincérité sa culture et sa langue. L’origine éthique ou régionale n’y intéresse personne. Mais la volonté de vouloir le diriger exige des conditions parmi lesquelles l’usage du Wolof.
Karim Wade comprend le Wolof. Mais nul dans ce pays ne l’a une fois entendu s’exprimer en Wolof. Vouloir vendre sa candidature et dire qu’il parle cette langue est une fourberie. On peut comprendre parfaitement une langue sans être capable de la parler. C’est ce que vit Karim Wade.
Dans l’hypothèse où il serait en campagne électorale, sa stratégie de communication ne serait que des parades publiques et des mouvements de foule. Son père en est si conscient que du temps de sa gloire, il ne lui confiait que des charges ministérielles qui le mènent vers l’extérieur et non vers la campagne et le monde rural.
Le problème de Karim Wade est celui de Lionel Zinzou du Bénin. De père Béninois et de mère Française, il a été appelé aux affaires par Thomas Yayi Boni pour être son Premier ministre. Il se distingua immédiatement par son génie technocratique de bâtisseur. La puissance d’État et les ovations publiques l’ont alors galvanisé à se porter candidat du parti de Yayi Boni et à défendre ses couleurs à la Présidentielle de 2016.
Mais considéré à tort comme un toubab en raison de son épiderme et de la nationalité française dont il dispose, il a été défait surtout par une simple cause : il ne parle ni le Fon de Dahomey, ni le Mina, les deux langues vernaculaires du Bénin. Les PDS doit être conscient que le fait que Karim Wade ne parle pas Wolof est une limite dans sa communication publique. Il lui faudra descendre sur le terrain, parcourir le Walo, le Baol, le Saloum, le Ndoucoumane, le Djolof, entre autres, et parler aux gens des ces territoires pour conquérir leur adhésion et s’imposer.
Il a voulu être Maire de Dakar sans parler aux Dakarois. C’est un défi qui est lancé : personne ne peut attester avoir entendu Karim Wade tenir un discours ou une causerie en Wolof. N’être pas capable de parler de cette langue est une infirmité politique difficile à corriger. Ce n’est pas, à presque 50 ans, qu’on se décide à parler la langue maternelle de son père.
Senghor avait un Wolof succulent à la tonalité charismatique. Diouf avait également un Wolof équilibré. Wade fut un génie de la communication par un esprit fin et fécond imbibé de paraboles, de métaphores, d’allégories et de jeu de calembours. Son usage du Wolof fut l’un de ses principaux atouts en politique. Ce n’est pas le cas de Karim Wade. Il comprend la langue, mais ne la parle pas. Un point. Un trait.
Le Piroguier